D’une certaine manière, nous pouvons dire que l’orientalisme est l’ensemble des représentations que se fait l’Occident de l’Orient. Cela implique qu’il en dise bien plus sur l’Occident que sur l’Orient et explique qu’il varie en fonction des dites représentations, ce qui signifie qu’il ne puisse pas donner une vision objective de l’Orient.
Comme le dit E. W. Said, « l’orientaliste est en dehors de l’Orient ». Et c’est cet état de fait qui pose problème à R. Guénon qui affirma que pour comprendre les doctrines orientales, « il faut pour ainsi dire les étudier “du dedans”, tandis que les orientalistes se sont toujours bornés à les considérer “du dehors” ».
Pour lui, les travaux des orientalistes sont « absolument insuffisants pour permettre la compréhension d’une idée quelconque, et en même temps complètement inutiles, sinon même nuisibles en certains cas, pour un rapprochement intellectuel entre l’Orient et l’Occident ».
Et puisque « l’orientalisme est un fait culturel et politique », comme le dit Said, on peut considérer qu’il fait partie d’une lutte idéologique, pour reprendre les termes de M. Bennabi.
Tout d’abord via sa branche polémiste, l’orientalisme s’attaque frontalement à l’islam, épuisant ainsi l’énergie des musulmans qui s’attarderont à leur répondre. Énergie qui aurait pu être utilisée pour construire plutôt que pour réfuter.
Et via sa branche apologétique, l’orientalisme, toujours selon Bennabi, contribue à anesthésier l’esprit des musulmans en leur rappelant la gloire d’une civilisation passée alors qu’ils devraient s’atteler à régler les problèmes du présent pour reconstruire une civilisation. Cinglant, il dira qu’ « on ne remédie pas aux misères d’une société en lui contant les splendeurs de son passé ». C’est pour cela qu’il aura, par exemple, un regard très critique sur le livre « Le Soleil d’Allah brille sur l’Occident » de Sigrid Hunke.
Selon Bennabi, même si l’orientalisme apologétique a pu avoir un effet positif, dans le sens où elle a permis à toute une génération de renouer avec sa culture, cette idéologie a eu un impact également très négatif sur l’esprit musulman. L’esprit musulman qu’il décrit d’ailleurs comme étant « un esprit à la recherche d’une dose d’orgueil pour surmonter l’humiliation infligée par la culture triomphante de l’Occident, comme le morphinomane recherche sa drogue pour surmonter momentanément sa défaillance morbide ».
Sources :
◾️ René Guénon, Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues.
◾️ Malek Bennabi, Les grands thèmes (cliquez ici pour commander le livre).
◾️ Edward W. Said, L’orientalisme (cliquez ici pour commander le livre).
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